Cai Guo-Qiang

Publié le par Toutoune

Année Scolaire 2006-2007     
Guillaume Rambouillet
Université Montpellier III Paul Valéry
 
Master 1 Professionnel mention patrimoine
 
Conservation, gestion et diffusion des œuvres d’Art du XX° siècle
W1AHAMPM Méthodologie
Cours de Mr Claustrat Franck
Maître de conférence   en histoire de l’art
Dossier artiste
 
 
 
 Cai Guo-Qiang
 
« La Grande Image n’a pas de forme »
 
Sommaire :
 

 
 
J’ai souhaité me pencher sur la question de l’art chinois « actuel » (le terme contemporain étant trop ambigu). Il est vrai qu’il existe une vogue actuelle envers ce pays, relayée par des collectionneurs, des médias. Mais parler de mode serait trop réducteur. Bien sûr il y a du surfait comme régulièrement en art contemporain, mais on ne peut ignorer l’activité artistique d’un pays qui a plus de 35 siècles de culture revendiquée derrière lui, qui a su pousser son art et sa philosophie à des niveaux très avancés. On peut au moins lui accorder de la curiosité. De plus la Chine faisait jusqu’à maintenant partie des pays dits émergeants. Mais à savoir qu’en niveau de croissance économique elle a le pourcentage le plus élevé devant les Etats-Unis et qu’elle pourrait dépasser l’Allemagne au rang des pays les plus riche laisse réfléchir. Je veux dire par là qu’elle est amenée à être de plus en plus présente plus le plan international, en tant que superpuissance diplomatique, économique, et peut-être culturelle. C’est dans ce cadre réflexif que j’ai souhaité me pencher sur Cai Guo-Qiang. Cai Guo-Qiang est né en 1957 à Quanzhou, d’un père artiste-peintre et d’une mère historienne.
 Connu depuis quelques années pour ses œuvres pyrotechniques à travers le monde, il vit et travaille à l’étranger (il est situé à New York depuis 1995). Mais toutes ses œuvres et leurs mises en scènes rappellent continuellement la Chine et sa culture millénaire. C’est cet entre-deux que j’ai souhaité traiter chez Cai Guo-Qiang : à la fois artiste contemporain chinois et occidental. Il semble avoir inventé un vocabulaire entre deux cultures, jetant des ponts entre des civilisations qui se regardent de haut, s’ignorent parfois, ou se fascinent l’une l’autre.
Mais il ne s’agit pas ici d’opposer modernité occidentale à tradition chinoise, ce que l’on retrouve régulièrement, voir autant chez les muséographes occidentaux que chinois[1].
C’est pourquoi nous pouvons faire une introduction à la pensée chinoise (métaphysique). Ce qui nous permettra de déterminer en quoi l’œuvre de Cai Guo-Qiang se déploie e,n deux thématiques principales : un art de l’entre-deux et un art de l’informel.
 

 
 
Cai Guo-Qiang imagine une oeuvre atmosphérique se déployant entre terre et ciel, rêve de dragon déroulant leur corps onduleux entre les nuages et invite les géomanciens à repérer les lignes de vie au niveau du sol. Il conçoit donc en terme d’Energie vitale plutôt qu’en termes d’être ou de substances. Il s’attache aussi à la notion de « naturel » (procès, fond d’immanence) plutôt que de « nature » (objet). Il s’échappe aussi donc de la conception d’œuvre d’art comme représentation ou anti-représentation, lui préférant les concepts de processus et de phénomène (que l’on retrouve dans les explosions et feux d’artifices).
Il faut comprendre les deux appréhensions différentes du monde extérieur (deux métaphysiques liées à deux manière de se comprendre dans le monde). La première, occidentale, provient principalement de l’Antiquité grecque : le mode de compréhension du monde passe par la vue (activité de perception principale), ce qui amène à traiter le réel « vu » comme sujet de connaissance. Le deuxième mode (asiatique, ou du moins chinois) met en avant la respiration comme principal être-au-monde : c’est un souffle, une énergie, un mouvement voire un dualisme (intérieur-extérieur). Le monde procède donc de cette alternance régulatrice (le non de ce souffle-énergie est le « qi » (prononcer « chi ».) En découlent aussi les termes de yin et yang.
Ceci permet de comprendre le cadre de la démarche de Cai Guo-Qiang : tandis que l’Europe prend la nature comme champ d’observation, de connaissance et par la suite de domination (voir Descartes et les animaux-machines), l’insondable, le surnaturel étant invités à prendre place dans le champ nommé « Dieu ». La Chine n’ayant pas placé cette distinction explicite de la même manière, le naturel et le surnaturel peuvent encore se conjuguer en même temps. Il n’y a d’ailleurs quasiment pas eu de science physique développée en Chine : les recherches furent menées plutôt par des alchimistes. C’est vers cet insondable, à la rencontre du naturel et du surnaturel que Cai Guo-Qiang veut ouvrir les esprits. Cet entre-deux, mystérieux, que l’on retrouve dans les termes extra-terrestre et terrestre, surtout au travers des gigantesques explosions, feu fantasmagorique que Bachelard lui-même décrivait en son temps.
En art, la figuration chinoise, contrairement à la mimesis grecque (transposition/duplication), n’a pas pour but de fixer les essences mais d’enregistrer un jeu d’énergies en interaction continue dont elle dévoile la cohérence. La figuration n’est pas une particularité humaine mais une capacité à l’œuvre dans le monde. Le Tao, principe essentiel de la philosophie chinoise (traduit par « la voie » ou « le principe ») demande de ne pas créer d’image au sens occidental : cela signifie que l’image serait une forme qui se distingue d’une globalité (le monde). Et cette distinction est partialité (au sens de partiel et partial) donc incomplète. C’est pourquoi le Tao vise le vague ou le flou, qui seul évite la détermination et la disjonction : "Le Tao que l'on peut nommer n'est pas le Tao". C’est peut-être là l’essence de l’art de Cai Guo-Qiang (voir les explosions et autres performances qui sont un phénomène, un processus de l’instant, dont les photos et toiles ne sont que traces, comptes-rendus). De même pour la pensée du Vide : « dans l’optique chinoise, le vide n’est pas comme on pourrait le supposer quelque chose de vague ou d’inexistant, mais un élément éminemment dynamique et agissant. Lié à l’idée des souffles vitaux et du principe d’alternance du Yin Yang, il constitue le lieu par excellence ou s’opèrent les transformations, ou le plein serait à même d’atteindre la vraie plénitude. C’est en effet lui qui, en introduisant dans un système donné discontinuité et réversibilité, permet aux unités composantes du système de dépasser l’opposition rigide et le développement en sens unique, et offre en même temps la possibilité d’une approche totalisante[2] ».
 
 
Il ne faudrait pas voir en Cai Guo-Qiang un artiste typiquement chinois au sens simple (voire simpliste) du terme. La différence culturelle qu’il semble mettre en avant n’est pas pur folklore (d’ailleurs pas reconnu dans son pays d’origine). Il est équivoque, entre les deux. Il renvoie à chaque culture la perception de l’autre, par ses détournements : Venice’s Rent Collection Courtyard (1996) qui lui a permit d’obtenir le lion d’or à la biennale de Venise et qui l’a fait accéder à la reconnaissance en occident n’est pas réductible à un coup, une provocation d’un artiste chinois en mal de reconnaissance à l’extérieur. Le jury qui lui donna le prix de la sculpture déclara d’ailleurs : « [une œuvre] hors du commun, maîtrisant à la perfection son propre espace » et dont le créateur « interroge l’histoire, la fonction, l’épopée de l’art à travers une procédure d’isolement contextuel sur le plan temporel et concret[3] ». est compris par certaines personnalités en Chine (intellectuels ou politiques) comme un plagiat et une mascarade politique. En effet Rent Collection Courtyard est une œuvre de propagande très connue en Chine des années 60. Il s’agit d’une série de sculptures (une centaine) grandeur nature, en terre cuite, mettant en scène le thème de l’exploitation des paysans par les propriétaires avant l’avènement du communisme. L’œuvre de Cai Guo-Qiang, a consisté à inviter des sculpteurs ayant travaillé à l’époque sur l’œuvre originale, pour qu’ils refassent une œuvre équivalente (quelques tableaux). Le but n’était pas de livrer un oeuvre terminée mais de donner au spectateur la vision de tout le processus de création tout au long de la biennale. De plus, la terre n’étant pas cuite, ce qui incluait la détérioration les sculptures voire leur destruction à plus ou moins court terme. On retrouve dans cette œuvre la prégnance de la mise en œuvre du temps et du processus créatif, ainsi qu’une volonté de critique du communisme et de son idéologie.
Il indique lui-même que la découverte de l’occident (étonnamment lorsqu’il partit au Japon en 1986, encore plus à l’Est, mais plus ouvert que la Chine à l’époque) l’a libéré, il a décidé de rompre avec une certaine norme artistique (codifications chinoises) en vigueur dans son pays : un carcan brimant toute inventivité. Mais il invoque dans un même temps un art de l’indétermination et du virtuel.
 
 
Tous en liant toujours les concepts de pont entre deux culture, mais y mêlant l’interaction avec les participants, je me suis intéressé à trois œuvres : Cultural Melting Bath : Project for the 20th century (1997), Une Histoire arbitraire : Rivière et Une Histoire arbitraire : Grand-Huit (2001 tous les deux).
Cultural Melting Bath : Project for the 20th century est une installation participative montrée pour la première fois au Queens Museum of Art en 1997. Il s’agit d’un espace sous voilures (immense filet) composé d’un jacuzzi phytothérapeutique (agrémenté d’herbes médicinales), de neuf pierres taihu (utilisée traditionnellement dans les jardins chinois) et dans lequel sont emprisonnés des oiseaux. L’artiste souhaitait ce lieu comme un espace parcouru d’énergie vitale. Apaisante et soignante, lieu de repos pour l’esprit et le corps favorisant la méditation, cette installation met en œuvre diverses réflexions sur le rapport de l’œuvre au participant, qui n’est plus simple spectateur, son rôle essentiel (qu’est-ce qu’une œuvre est censée nous apporter ?) et l’appréhension du mise en scène chinoise traditionnelle dans un lieu muséal d’exposition. Ce décalage entre musée américain et espace typiquement chinois rejoint cet effort de miroir entre deux cultures différentes. Cette œuvre est mise en perspective par rapport à elle-même quand l’artiste la représente dans deux autres pays : au japon en 1998 et en France en 2000 à la 5e Biennale de Lyon. Le comportement des différents spectateurs selon leur origine les interroge aussi sur le rapport à l’autre, à la nudité (donc à son corps) et à la promiscuité. Il est intéressant de dire qu’aux Etats-Unis, le fait de faire se déshabiller les gens (ils restaient en sous-vêtements ou en maillots de bains) à nécessité la signature de contrats avant le bain. Au Japon, dont il s’agit aussi d’une des traditions, il n’y a pas eu de problème, les gens restant dans un comportement quotidien, tandis qu’en France il y a eu des demandes pour pouvoir se baigner nu.
Une Histoire arbitraire : Rivière et Une Histoire arbitraire : Grand-Huit, lors de l’exposition au musée d’art contemporain de Lyon offrent deux perspectives différentes dans un même lieu, mais tout en offrant une approche formelle semblable.
La Rivière est un dispositif de 90,50m de long, il s’agit d’une structure au ras du sol, en bambous, fibre de verre et epoxy qui se déploie au rez-de-chaussée du musée : elle contient de l’eau et recrée le cours d’une rivière artificielle. Elle est complétée de trois bateaux en peau de yack qui permettent aux spectateurs de naviguer. Tout autour de ses méandres sont placées douze œuvres anciennes de Cai Guo-Qiang (certaines étant modifiées), sur le sol ou attachées aux plafond. Cai Guo-Qiang est son propre curateur dans cette recontextualisation plus qu’une rétrospective (terme qu’il refuse) et donne au spectateur un trajet à parcourir pour redécouvrir son travail. Bien que formellement linéaire, cette visite amène le spectateur à faire l’expérience de l’œuvre, à s’y intégrer, tout en jouant sur les rapport temps et espace. Mais également cela permet aux oeuvres elles-mêmes de trouver une autre définition, sorties de leur contexte d’origine et mises en contact. Le but de Cai Guo-Qiang est de voir « comment cela pourrait influer sur les œuvres elles-mêmes ainsi que sur l’espace d’exposition. Il en résulte de nouveaux enjeux, de nouvelles difficultés et une modification du contexte qui pourrait à la limite engendrer une nouvelle œuvre[4] ».   
 
Le Grand huit est une structure de manège de 67m de long, au dernier étage du musée avec wagonnet. Surmonté d’une fresque de type renaissance au plafond, reprenant diverses icônes de l’art du XXe siècle français : Marcel Duchamp, Dubuffet, Klein, Buren. Il offre un voyage, un déplacement temporel et spatial, une visite de ces œuvres dans le cadre muséal, tout en posant une réflexion sur l’activité ludique du parc d’attraction que peuvent devenir les musées. Il nous amène à une autre perception de ces œuvres, à notre propre culture, par le décalage et la temporalité qui s’opère. Le symbole des montagnes russes fait « appel au divin et au ciel, le wagonnet amène le spectateur de long en large à travers l’histoire, tandis que la rivière est par définition terrestre, elle se fraye un chemin à travers l’espace, qui représente une toute autre histoire[5] ».
 
 
Cai Guo-Qiang est surtout connu pour son utilisation de la poudre à canon et du feu. Ce matériau est emblématique de la culture et de la tradition de son pays d’origine. C’est la marque principale dans son travail de la permanence de la culture chinoise. Il utilise la poudre à canon dans des travaux pyrotechniques tels que des feux d’artifice mais également en tant que peinture (sur toile donc) ou même sur des vêtements (voir la collaboration avec Issey Miyake). On peut le mettre en perspective avec les expériences d’Yves Klein de même teneur, dans les deux cas on retrouve l’intérêt spirituel de l’utilisation du feu. Car en Chine, la poudre à canon a été découverte par des alchimistes et reste un symbole de la recherche de l’immortalité. Ce n’est que lorsqu’elle a été transformée par les occidentaux comme éléments essentiels d’armements qu’elle est devenue « destructrice ».
Lorsqu’il par pour le Japon en 1986, il a déjà commencé à travailler avec la poudre à canon, principalement sur des tableaux sur lesquels la poudre enflammée va laisser la trace du dessin tracé au préalable. Jusqu’en 1989 et la révolte de la place Tiananmen, il explore dans ses travaux la potentialité thérapeutique issue de l’étymologie chinoise du nom de la poudre à canon : feu-médecine. Après 1989, il sait qu’il ne pourra plus rentrer s’installer en Chine pour continuer à travailler aussi librement qu’il le fait à l’étranger. Certains aspects de son œuvre comme la critique de régimes politiques du 20e siècle et de leurs destructions ne lui permettrons pas d’être libre en Chine. Cette critique politique transforme donc la proposition de résidence de 2 ans au Japon en exil qu’il a lui-même décidé. C’est à partir de ce moment qu’il va passer à des procédés de beaucoup plus grande ampleur : le changement d’échelle de ses travaux pyrotechniques commence avec la série « Projets pour Extraterrestres ». Son but est de produire des évènements (pour ne pas dire des spectacles) pyrotechniques visibles du delà de l’horizon (accessibles aux E.T).
 
 
Cai Guo-Qiang a développé une technique du 'dessin' sur papier avec de la poudre à canon; ces esquisses font maintenant partie intégrante de ses projets d'interventions majeures à base d'explosifs. Accompagnées de documents photographiques, ces esquisses sont souvent les seules preuves tangibles de ces événements éphémères. Ces esquisses sont aussi parfois des idées de travaux préparatifs non aboutis, car trop difficiles à réaliser. L’artiste juxtapose le geste contrôlé de la peinture et celui de la force incontrôlable du feu, soulignant ainsi la dichotomie entre la nature humaine et les forces cosmiques, tout en les conciliant de façon harmonieuse dans une œuvre d'art.
Le résultat du processus, la trace ne constitue qu’une visualisation aussi durable que spontanée d’un concept maniant à la fois aléatoire et accidentel. « Pour mois, au moment précis de l’explosion, le spectateur se sent en harmonie avec l’énergie fondamentale de l’univers, comme s’il traversait le mur du temps et de l’espace[6] ». Le feu, comme l’a noté Gaston Bachelard dans la Psychanalyse du Feu, déclenche les passions humaines : il est à la fois protecteur et destructeur, il fascine et produit à la fois excitation ou sentiment de contemplation. Les œuvres de feu de Cai Guo-Qiang sont ainsi souvent monumentales, par les moyens techniques mis en œuvres autant que par les résultats (feus d’artifices géants). Ce qui renforce l’impact sur le spectateur. La beauté n’est rien d’autre que le début de la terreur que nous pouvons à peine supporter, et nous l’admirons parce qu’elle dédaigne calmement nous détruire.
A l’origine, le projet pour les extraterrestres interrogeait plutôt la place du monde humain dans l’univers, sa capacité à se penser dans le monde. Mais au fur et à mesure, une évolution a sous-tendu ses travaux : l’interrogation spirituelle laisse de plus en plus de place à une réflexion sociale et politique. Bien qu’il y ait toujours cette démarche de cosmologique de créer des ponts entre Ciel et Terre ou entre l’espace et le temps (« il y a un dicton chinois qui prétend que la découverte de la poudre à canon est issue de la quête de l’immortalité[7] »), Cai Guo-Qiang travaille également sur des thématiques plus actuelles, utilisant la symbolique du champignon atomique ou des fusées lancées entre la Chine et Taiwan. Deux évènements viennent modifier sa vision de son travail pyrotechnique : les évènements de la place Tiananmen en 1989 puis les attentats contre les Twin Towers en 2001 à NYC. Il est évident que son travail n’a plus la même portée : faire des explosions à NY porte une charge telle qu’elle change l’appréhension de son travail par les spectateurs.
Les œuvres pyrotechniques de Cai Guo-Qiang se retrouvent principalement sous une double forme : les feux d’artifices tels qu’ont les connaît et les explosions. Les deux sont des facettes du même phénomène. Mais tandis que les premiers se conçoivent comme un spectacle contemplatif et célébratif pur, les seconds sont plus « chargés » ideologiquement. Mais les explosions, en plus de renvoyer à la guerre, aux armes, voire à l’inhumanité (depuis Hiroshima et le 11 septembre), sont en Chine synonymes des célébration du nouvel an (on fait exploser des pétards dans le but de chasser les mauvais esprit pour commencer un nouveau cycle). La série des Black rainbows (arcs-en-ciel noirs) permet de faire le pont entre les deux : il s’agit de multiples explosions prenant la forme d’un arc de cercle, caractérisées par les traces de fumée noire laissées dans le ciel comme des persistances rétiniennes de l’explosion. On peut d’ailleurs faire un lien avec la peinture puisque les traces de fumée paraissent comme des touches d’encre de chine posées par l’artiste dans le ciel. Cette série (à Edimbourg et à Valence en 2005 lui est venue alors qu’il travaillait sur un projet à Valence au moment des attentats de Madrid en 2003. De même dans la série The century with mushroom clouds : project fot the 20th century il interpelle le regard du spectateur sur cette forme uniquement connue du XXe siècle qu’est le nuage atomique en forme de champignon. Les photos qui en découlent montrent l’artiste devant un paysage, tenant à bout de bras l’explosif (dans un tube) d’où va sortir le nuage. Les lieux où il à développé cette série sont à chaque fois liés à l’arme nucléaire : dans des pays possédant l’arme atomique, voire sur un ancien site de test dans le Nevada. Il nous remet en contexte, nous renvoie au souvenir de l’évènement. Il rappelle également la puissance des dieux qui peuvent tuer les hommes en lançant la foudre de leurs poings.
D’autres fois, les travaux pyrotechniques servent à mettre en avant le lieu dans lequel ils se déroulent, suivant la ligne du paysage urbain (explosions de charges placées le long des toits des bâtiments ou de l’horizon, notamment de nuit où la ligne ainsi tirée sépare le ciel et la mer qui alors ne faisaient qu’un (The Horizon from the Pan-Pacific, 1994).
 
 
 
 
Depuis quelques années, Cai Guo-Qiang construit un art ni intimement chinois ni expressément occidental. Il se veut le mont entre deux rives, celui qui permet à deux cultures de s’interroger sur elles-mêmes. En cela il est aidé par le contexte de mondialisation depuis les années 90 et l’ouverture économique et culturelle de la Chine depuis 1978. Procédant à la fois d’un art de Grand-messes (les gigantesques feux d’artifices) et d’une critique politique (rapport Chine/Taiwan ou utilisation de l’arme nucléaire), Cai Guo-Qiang est proche d’une forme de post-modernisme. Il manie à la fois le cynisme opérant dans le monde actuel, tout en utilisant le formes les plus traditionnelles d’une culture millénaire, on peut se demander s’il ne s’opère pas dans sa création l’élaboration d’un nouveau vocabulaire artistique ?
 

 
Ouvrage spécialisé :
-         Cavaluccio, Fabio, Cai Guo-Qiang, Silvana Editoriale, Milano, 2002.
 
Catalogues d’expositions :
-         Alors, la Chine ?, Editions du Centre Georges Pompidou, Paris, 2003.
-         Cai Guo-Qiang : une histoire arbitraire, 5 Continents Editions srl, Milan, 2002.
-         Créateurs du nouveau monde, catalogue de la biennale Montpellier/Chine :1, Editions Au Diable Vauvert, 2005.
 
Revues :
-         Cotter, Holland, “Public Art Both Violent and Gorgeous”, in New York Times, New York, 14/09/2003.
-         Goodbody, Bridget, "The Peace Process", in ArtReview, UK, 11/2004, p. 10, 90-91, 104-107
 
Site internet :
-         Caiguoqiang.com
 
 
 


[1] Le Gouriérec, Frédéric, « De l’art de la période républicaine », in Alors, la Chine ?, Editions du Centre Georges Pompidou, Paris, 2003, p. 62.
[2] Cheng, Françoise, Vide et plein, le langage pictural chinois, Seuil, 1979, Paris, p. 45, 46.
[3] Minxian, Wang, « Chronique des évènements autour de Rent Collection Courtyard à Venise », in Cai Guo-Qiang, une histoire arbitraire, 5 continents éditions srl, Milan, 2002, p. 62.
[4] Cai Guo-Qiang, une histoire arbitraire, 5 continents éditions srl, Milan, 2002, p. 51.
[5] Op. cit.
[6] Cai Guo-Qiang, « Mettre le feu, entretien par Jérôme Sans », in Cai Guo-Qiang : une histoire arbitraire, 5 Continents Editions srl, Milan, 2002, p. 46.
[7] Op. cit. 1.

Publié dans Rambouillet Guillaume

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